SELECTION 2012 - " Melody in the shadows "
Fiction (voir article COMPETITION Partie 1/4)
Qu’est
ce qui te passionne dans le cinéma ? Qu’as-tu envie d’exprimer à travers
tes films ?
J’aime tous les genres, mais ce qui me touche se
sont les histoires réalistes, humaines, qui ont un message à faire passer. J’aime
les films qui bouleversent, auxquels tu penses encore après.
J’admire le documentaire, mais personnellement
je préfère faire des fictions. Mon film « Melody in the shadow »
aurait pu être un documentaire, car il parle d’un problème que nous sommes en
train de vivre au Liban, notamment la démolition des bâtiments historiques et
des traditions libanaises. J’ai cependant préféré traiter ce sujet à travers
une fiction, car j’aime parler des relations humaines et puis cela m’a
permis de mixer ces deux choses : les relations humaines et l’histoire.
Que symbolise donc le bar pour
toi ?
Il symbolise la société libanaise. Les sept
personnages, de tranches d’âges différentes et de milieux sociaux divergents, ont
chacun une propre histoire et parlent d’un sujet relatif à la société libanaise.
Ils ont tous un problème…
Des problèmes
personnels ou avec la société ?
Le
médecin par exemple a un problème avec la société, la pauvreté, il a des idées
révolutionnaires…La femme par contre a un problème personnel mais qui est
propre à de nombreuses femmes au Liban : la peur de vieillir. Il y a des
liens entre les histoires personnels des personnages et la société libanaise
qui est en train d’être détruite.
A
la fin de ton film le bar est fermé, mais on entend les voix, on entend la
musique…Il y a comme une âme qui reste…
Exactement,
pour moi les souvenirs ne s’oublient jamais. C’est ça le message. Le bar va
être fermé contre la volonté des habitués. Ils ne partent pas, ils reviennent
tous les jours et essayent de vivre leur routine jusqu’à la dernière minute.
Ils
sont donc heureux avec cette routine ?
Chaque
être humain s’habitue à sa situation, même s’il n’est pas heureux. On pense
mille fois avant de voyager, de changer ses habitudes qui sont chères à
soi-même.
Si
on perd ses habitudes, ses repères, sa routine on perd son identité ?
Oui. Quand on est en train de détruire des bâtiments
traditionnels, on est en train de ruiner notre identité. On va finir par
ressembler à d’autres endroits…
Pourquoi d’après toi la société
libanaise n’est pas plus impliquée contre les démolitions actuelles, par
exemple tout récemment la destruction du port phénicien?
Il y a des jeunes impliqués. C’est ma raison de
faire ce film. Il faut transmettre un message. Beaucoup de personnes se
demandent qu’est ce qui va venir à la
place de cet endroit, moi j’ai envie de
me poser la question : qu’est-ce qu’il y avait avant à cet endroit ?
C’est eux [les personnages du film] qui sont importants, l’âme qui est
dans ce lieu-là.
Ne penses-tu
pas qu’il y a aussi un travail sur le passé, l’histoire qui n’est pas fait ?
On doit apprendre de notre passé
ou bien on refait la guerre. On ne peut pas oublier le passé.
Comment
as-tu réussi à réunir tous ces acteurs connus ?
J’ai eu de la chance… J’ai
fait la connaissance de Rodney El Haddad et c’est lui qui m’a par la suite introduit
à Julian [Farhat] et Alain [Saadeh]. Ils ont aimé le scénario, le message et
ont accepté. Ils aiment aider les étudiants, contribuer avec leur talent aux
films de diplôme. Evidemment j’ai vu les acteurs plusieurs fois avant de
tourner.
Ils m’ont laissé les diriger,
m’ont aidé, écouté. Ils ont mis leur touche tout en suivant ma vision à moi.
On reste un peu sur notre faim avec
ton court-métrage…Est-ce que tu as le projet de développer ce scénario ou ce
sujet ?
C’est un sujet très important, ce n’est pas
terminé et la situation évolue encore au Liban. Ces sept personnages on peut
les développer de manière très profonde avec un long-métrage. Mais on dit ça…c’est
ce que moi je veux…on ne sait pas…
Est-ce qu’il y a des grands noms du
cinéma libanais qui t’inspirent ? Par exemple, actuellement Jocelyne Saab
est assise pas loin de toi…
Je vois le courage chez eux, c’est beau les
messages qu’ils transmettent. Ces réalisateurs ont vécus la guerre, ils ont
vraiment été touchés. La nouvelle génération – il y a des vrais talents - n’a pas vraiment été touchée par la guerre,
par le sens, plus par la politique, par ce qui s’est passé en 2006. Donc les
sujets abordés dans le cinéma libanais vont changer. Bien sûr il y a la
politique, mais il y a beaucoup d’autres messages.
Qu’est ce qui touche la jeune génération
actuellement ?
Je pense que c’est l’immigration. Toute ma
famille est dehors, mes amis sont dehors. Sometimes you feel that you’re
alone dans ton pays. C’est bizarre. Il y a aussi le manque de travail… Mais
ce qui est bien au Liban c’est qu’il y a un truc, une flamme, un charme, un feeling,
un sentiment qui est fort. Il faut trouver le secret.
Fais-tu parti des libanais qui vont
partir, partir pour mieux revenir et changer les choses ici ?
Il ne faut pas s’attendre à ce que les choses
changent toutes seules. Il faut partir pour grandir, gagner de l’expérience,
voir autre chose, d’autres cultures et retourner avec un bon bagage. Ici il y a
des problèmes politiques qui ne nous laissent pas la chance de faire ce qu’on
veut, donc je comprends les gens qui s’en vont. C’est malheureux, mais c’est la
réalité.
Quels sont tes projets pour l’avenir?
Ici le monde de la publicité marche, mais c’est
loin du cinéma. Je viens de terminer quelque chose donc toutes les portes sont
ouvertes… La possibilité de partir ailleurs m’intéresse, éventuellement en France.
Je ne me sens pas étrangère là-bas, les français sont proches de nous et puis j’ai
ma famille là-bas.
Tu es donc sélectionnée pour le
festival, quel effet cela te fait ?
C’est très excitant. It’s nice. Le
Festival du cinéma libanais regroupe tout ce qu’il y a de nouveau, donc il y a
cette curiosité de voir ce qu’il y a dans la tête des réalisateurs libanais. Je
suis très heureuse d’être parmi ces films.
Aout 2012
Interview réalisé par Lucile Gasber
Interview réalisé par Lucile Gasber
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